David Le Breton - Du silence




David Le Breton - Du silence

Sujet étonnant comme on en trouve parfois chez les sociologues et anthropologues mais qui nous permet d'orienter une réflexion sur un thème qu'on aurait pas forcément abordé de soi même.
Paru en 1997, l'auteur y fait vraiment le tour du sujet.
D'abord le silence dans ce qu'on lui connaît de plus quotidien, dans la conversation. On connaît tous des moulins aux paroles intarissables ou au contraire des "calmes silencieux". Ensuite on passe aux silences institutionnalisés qui peuvent avoir plus de sens que des paroles.
Le plus long chapitre porte sur le silence dans la spiritualité qui j'avoue m'a un peu pesé à la longue mais on peut dire que la question est retournée dans les sens: christianisme, islam, judaïsme, bouddhisme, hindouisme puis mysticismes...
On termine par le silence induit par la mort, la souffrance, le deuil, l'absence et la nécessité de dire.
C'est le septième ouvrage de David Le Breton que je lis et il m'a paru un peu moins exaltant que d'autres mais je suis content d'avoir été au bout.


 

Emily Dickinson - Ses oiseaux perdus




Emily Dickinson - Ses oiseaux perdus

Emily Dickinson est une poétesse américaine qui aura composé environ 1800 courts poèmes durant sa vie au milieu des années 1800. Tiens donc!?
De nature très introvertie, recluse, sa vie et son œuvre resteront dans l'ombre jusqu'à sa mort en 1886. En effet, elle n'a publié qu'une dizaine de poèmes de son vivant, le reste étant resté caché. Sur son lit de mort, elle fait jurer à sa sœur de tout brûler. Celle ci brûlera sa correspondance mais pas le coffre contenant les poèmes de tout une vie. Publiés de manière posthume, son œuvre ne cessera de se faire connaître.
Son écriture est assez caractéristique avec des textes très courts, une ponctuation et des tirets étranges, des majuscules, pas de titre ni de classement particulier...Les thèmes qui reviennent le plus souvent sont les fleurs, le macabre, l'ironie mais aussi quelques préoccupations évangélique. C'est la quatrième recueil que je lis et je suis surpris de ne pas en avoir déjà parlé. Celui ci est consacré aux derniers écrits de sa vie influencés par une série de deuils et l'arrivée d'un certaine technologie qui l'effraie. La plupart des éditions traduites en français le sont avec le texte anglais original.



 

Donald Ray Pollock - Le Diable tout le temps




Donald Ray Pollock - Le Diable tout le temps

Conseillé par Charlotte Bourlard, je me suis lancé dans ce roman percutant paru en 2011 qui porte bien son titre. Salué par la critique, c'est le premier roman d'un auteur sur le tard pourtant prometteur. 
La narration est extrêmement bien ficelée et on se laisse embarquer dans ces différents destins violents qui finissent par s'entremêler. A l'exception peut-être de Alvin Russel, le point commun des personnages semble être le mal qui les ronge à différents niveaux. Vengeances, corruption, sexe non consenti, perversion tout y est. L'ambiance est toute américaine des années 1945 à 1965 et me fait un peu penser à l'univers d'Hubert Selby Jr pour autant que je m'en souvienne avec un soupçon de Steinbeck. La culpabilité et d'autres notions bien chrétiennes sont comme un fil conducteur dans cette intrigue qui m'a fait dévorer l'ouvrage en deux jours à peine.
Je préfère ne pas en dire plus pour vous laisser le plaisir de la découverte de cette pépite dite "country noir" dans laquelle vous pouvez vous plonger le cœur bien accroché.


 

Robert Macfarlane - Par les chemins




Robert Macfarlane - Par les chemins

Pour paraphraser Edward Thomas qui va être comme un fil conducteur tout au long de ce recueil paru en 2022 " On a beaucoup écrit sur le voyage, beaucoup moins sur la route".
Ce n'est pas un énième récit de voyage aventureux mais plutôt une réflexion sur les diverses routes ancestrales principalement d'abord en Angleterre, Ecosse. L'auteur nous emmène, anecdotes historiques à l'appui, sur les chemins crayeux le long des côtes puis par un chemin sableux dangereux uniquement accessible à marée basse.
Il s'essaie à la navigation à la voile comme bon nombre de nos ancêtres. Il attire notre attention sur ces nombreux entrelacs de véritables sentiers marins qui ne sont pas matérialisés par des "traces" mais plutôt par des poèmes, et des pseudo-cartes ancrés dans la mémoire collectives. Comme s'il fallait complètement revoir nos concepts des voies terrestres. Puis il nous parle de la tourbe, des gneiss, du granit,....
Tous ces récits sont ponctués de présentations de personnages qui ont donné leur vie à cartographier et garder en mémoire ces très vieilles routes. C'est un savant mélange entre randonnée et rencontres qui toutes se tissent dans une sorte de logique.
On part même en Palestine cheminer sur le calcaire avec un de ses amis et on est confronté aux dangers qui menacent le randonneur dans ces contrées occupées. Sans transition on se retrouve sur les chemins de Compostelle puis sur les montagnes sacrées tibétaines de Minya Konka avant de revenir en Angleterre dans les neiges des South Downs qui se mêlent à la craie.
On est amené à  réfléchir aussi sur les rapports adverses entre enracinement (arbres) et voyage (oiseaux), forêt (stable) et chemin (mobile); entre désirs incompatibles: marcher sans s'arrêter ou rester pour toujours en un même lieu comme dans une tombe.
Toute biographie ne peut jamais vraiment se rapprocher à 100% de la réalité, c'est pourquoi on a toujours un aperçu de seconde main sur la vie de quelqu'un. Une sorte de fantôme rétinien qu'on n'atteindra jamais.
Partant de cette idée, l'auteur finit quand même l'ouvrage par une histoire de la vie de son mentor
Edward Thomas qui sera happé par la première guerre mondiale et continuera jusqu'à son dernier souffle à trouver de la beauté dans la nature meurtrie par la boucherie des tranchées.