Raoul Vaneigem - Pour
une internationale du genre humain
Ecrivain et philosophe belge, Raoul Vaneigem participa à
l'internationale situationniste auprès de Guy Debord et a écrit une ribambelle
d'ouvrage des années 60 à nos jours. Je l'ai connu j'avoue, grâce à la reprise
de René Binamé "La vie s'écoule, la vie s'enfuit". Puis je suis tombé
sur cet ouvrage paru à l'aube du XXIème siècle à une foire du livre.
Contrairement à un Proudhon ou un Kropotkine, Raoul Vaneigem s'offre le recul
nécessaire d'une pensée qui a évolué en un peu plus d'un siècle pour la
redistiller à la sauce contemporaine.
Il s'agit d'une fronde incendiaire contre le capitalisme et l'économie de
marché, l'oppression et par la même occasion contre toutes les religions.
Dès que l'homme a cessé d'être chasseur cueilleur, il est devenu une machine à
produire. Le travail est né. D'abord dominé par la crainte de l'enfer
psalmodiée par les représentants des dogmes, l'homme a accepté sa vie de
souffrance. Avec l'arrivée des Lumières, de l'industrialisation et du
capitalisme il a fallu qu'il mérite sa pitance avec cette crainte perpétuelle
et cet abrutissement par l'effort. Le capitalisme a jeté les base de l'argent
pour l'argent qui devient une pure aberration puisqu' on perd sa vie à la
gagner pour pouvoir s'offrir des biens de consommation de plus en plus inutiles
et vides de sens. L'idée fallacieuse d'une croissance infinie au détriment de
toute forme de vie à fait basculer l'univers dans une autodestruction galopante.
Toute la société mondialisée base ses fondements sur l'argent au détriment du
respect de la faune et la flore terrestre. Le salut est dans la radicalité
contre toutes les idéologies fascistes ou pseudo communistes, contre
l'humanisme de pacotille, contre l'humain objet. La sacrosainte Ethique avec
laquelle le néocapitalisme actuel tente de nous faire avaler la pilule n'est
qu'un leurre qui cache l'ogre avide d'argent vide de sens.
On ferme cet essai sur la fin un peu fatiguant à force de martelage contre le
capitalisme avec le sentiment d'avoir vu se dessiner d'abord une trame des
idées qui à force de se développer et se répéter avec divers arguments fait apparaître la solide base pour une société humaine où seule la jouissance de
chacun et de tous doit primer.
Je termine par quelques lignes parlantes:
" En chacun se fait jour, à travers confusions et inhibition, un
extraordinaire sentiment de puissance potentielle, une force de vie qu'il
convient de cultiver et qui engage à combattre pour soi avec la certitude de
combattre avec et pour tous.
L'individu possède contre la foule des esclaves volontaires une arme dont
l'usage est subordonné à l'option fondamentale à laquelle il est confronté à
chaque instant de son existence: ou se laisser entrainer dans l'engrenage de la
barbarie, ou se battre sur tous les fronts de l'humanisation totale et offrir
aux enfants, aux femmes, aux hommes, aux bêtes, aux éléments végétaux et à la
terre la richesse de vie qui est en eux et dont nous sommes loin d'avoir
soupçonné les pouvoirs.
Une fois clairement établie la volonté d'assurer partout la souveraineté de
l'humain et de la vie comme dépassement de la survie, que le langage assume
dans une liberté totale l'extrême diversité à laquelle toutes les époques ont
secrètement ou ouvertement aspiré!
N'importe qui a le droit d'exprimer n'importe quelle pensée. Libre au premier
venu de défendre ses idées, fussent-elles les plus aberrantes, les plus
délirantes, les plus stupides, les plus odieuses, les plus ignobles, à la
condition expresse que, demeurant en l'état d'opinions personnelles, elles ne
prétendent s'imposer ni aux enfants ni à ceux qui ne souhaitent pas les recevoir.
Que tous les monologues soient autorisés mais que l'on sache aussi qu'il n'y
aura pas de dialogue avec la sottise et la barbarie.
Rien n'est sacré: chacun a le droit de critiquer, railler, ridiculiser toutes
les croyances, toutes les religions, toutes les idéologies, tous les systèmes
conceptuels, toutes les pensées. Il a le droit de conchier tous les Dieux, tous
les papes, prêtres, prophètes, pontifes, messies et gourous, tous les
monarques, chefs d'Etat, d'armée, de justice ou de bureau, tous les maîtres de
famille, d'école, de gang et de consortium.
Déliés du pouvoir des mots que nous imposait l'autorité patriarcale, nous
dénions désormais tout pouvoir d'action aux mots séparés du vivant. (...)
Préparons nous à anéantir - si possible sans coup férir et par la seule
souveraineté du vivant - toute pratique inhumaine, toute barbarie s'exerçant à
l'encontre de l'enfant, de la femme, de l'homme, de la faune, de la flore, de
l'environnement.
Tolérance sans réserve pour les idées, intolérance absolue pour tout acte
inhumain.
La meilleure prévention du crime est dans la destruction de l'argent qui
fanatise et corrompt et dans le dépassement des conditions de survie,
traditionnellement asservies au profit.
Le passage de la démocratie parlementaire à la démocratie directe ne peut
s'opérer que par la victoire de la qualité de vie sur le critère du nombre et
la quantification des êtres."

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