Michel Vieuchange - Smara
Intrigué par
le destin de cet aventurer français du siècle dernier découvert dans un ouvrage
sur la marche de David Le Breton, j'ai eu du mal à mettre la main dessus .
J'avais d'abord loué "L'ultime désert" d'Antoine de Meaux mais
comprenant qu'il s'agissait d'une interprétation, j'ai voulu commencer par la
source. Par hasard, je suis tombé dessus à la foire du livre des Kiwanis une
année précédente et je l'ai acheté.
Ce qu'on peut dire c'est que le style est aride comme le désert du Sahara, il
laisse un goût sec dans la bouche. Mais c'est normal puisqu'il s'agit de notes
brutes, sans relecture ou mise en forme. Cela change de récits exaltés, plein
d'héroïsme par lesquels certains auteurs seraient tentés d'enjoliver la
réalité.
Nous devons
à son frère Jean la publication de ce carnet de voyage effectué en 1930 dans le
Sud marocain/Mauritanie.
En plein époque coloniale française, certains coins du désert saharien sont
toujours en proie au baroud. Les cheiks se disputent des territoires, tout
homme français est forcément mal vu et sujet à rançon.
Accéder à la ville mystère de Smara était comme une obsession pour Michel, une
lubie et il a tout sacrifié pour y parvenir avec l'aide morale de son frère
Jean. L'ombre de René Caillé cent ans plus tôt plane sur sa motivation et il va
y mettre toutes ses économies.
Aucun homme blanc n'aurait jamais pénétré cette ville fantôme. (Pourtant
l'histoire dit qu'elle fut attaquée et incendiée par les troupes française de
1913...?)
Déguisé en femme, il va acheter la complicité d'homme de confiance pour
atteindre son but. On est confronté au fil des pages à son impatience, il
trépigne véritablement de se mettre en action. C'est sans compter sur la notion
de présent ou de futur des maures. Son cerveau occidental ne comprend pas
toujours la logique des casbahs et les départs prennent parfois des jours ou
des minutes.
Après une première tentative avortée par l'infection du pied d'un de ses
compagnons d'infortune, il est contraint à macérer une fois de plus dans son
interminable attente. Sa souffrance physique et la malnutrition n'auront
pourtant pas raison de son obstination et le deuxième raid sera couronné de
succès.
Victoire pourtant amère et tellement frustrante puisque constamment aux aguets,
son équipe l'oblige à repartir très vite. Il n'aura que trois malheureuses
heures pour déambuler dans ces ruines tant fantasmées. Ils échappent aux
combats mais il est parfois forcé de se cacher immobile dans un panier
suspendus aux flancs des méharis durant des heures. Jalousies et trahisons ne
cesseront de le persécuter, il tentera de relativiser, de se satisfaire de cette
prouesse, se réjouissant d'un retour vers ses pénates apaisantes.
Malheureusement, il retrouve son frère après environ 1400 km parcourus, miné
par la dysenterie dans un épuisement total, n'ayant plus la force de continuer
à vivre.
Curieuse aventure donc pleine d'une certaine absurdité...

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