San-Antonio - De A jusqu'à Z




San-Antonio - De A jusqu'à Z

Moment de récréation avec ce numéro 46 paru en 1961. Je le classerais dans les excellents SA car il faut bien l'avouer ils ne se valent pas tous ! Frédéric Dard s'est surpassé niveau calembours et jeux de mots.
San-Antonio assiste à son propre enterrement car c'est la quatrième fois qu'on tente de le supprimer. Cette fois, sur les conseils du Vieux, il va simuler sa mort ce qui va lui laisser une meilleure marge de manœuvre. Sa brave femme de mère sera mise à l'abri au couvent le temps que l'affaire se dénoue. Il semblerait qu'il détienne la clé de l'énigme de ce réseau de bandit qui prépare un mauvais coup. En éternel charmeur, il s'éprend dans un rade d'une jolie nana qui va s'avérer un rouage de l'organisation qu'il traque. Valise à double fond, machine à écrire, drogue feront partie de cette intrigue internationale qui le mènera à Londres.
A conseiller pour une belle première approche du monument San-Antonio pour les néophytes.


 

Michaël Lambert - Mon corps d'avant




Michaël Lambert  - Mon corps d'avant

C'est finalement une première expérience de la poésie de cet auteur liégeois qui a plusieurs cordes à son arc. Il était mis en avant à la bibliothèque, ce qui m'a décidé. Ce long poème paru en 2024 m'a surpris, je ne sais pourquoi son titre m'a fait croire à un poème sur peut-être un changement de sexe? Mais il n'en était rien, c'est une sorte de catharsis sur l'avènement inattendu d'un infarctus visiblement subi par l'auteur. Divisé en quatre partie relatant la pathologie, son traitement, ses effets secondaires et son terme, on y voyage à travers le prisme du ressenti et ses conséquences. Je l'ai lu d'une traite et ai vraiment pu me plonger dans cette introspection qui se conclut par un retour à la nature.
En voici un court extrait:


" De planter un arbre par jour
Pour les rêves à venir
Et les branches où accrocher les balançoires
Sans espoir de voir se lever les cimes
Mais rassuré de bientôt nourrir les racines"


 

Denis Grozdanovitch - Le génie de la bêtise




Denis Grozdanovitch - Le génie de la bêtise

Recommandé par une lecture de Georges Picard, j'ai découvert cet auteur français qui fut aussi champion de tennis et squash mais est aussi amateur du jeu d'échecs.
Cet essai paru en 2017 virevolte entre souvenirs personnels, références littéraires et philosophiques d'une façon un peu décousue mais fort plaisante. On peut gouter au style érudit mais avec une certaine humilité de l'auteur. Montaigne, Flaubert, Valéry, Sartre ... font partie de cette cartographie qu'il nous fait parcourir.

On démarre sur un souvenir d'un cousin éloigné dit "simplet" qu'il côtoya durant son enfance mais qui avait une faculté incroyable d'intelligence qu'on peut qualifier de naturelle. Sorte de don pour débusquer les animaux sauvages, pouvoir les approcher voire interagir avec eux.  Avec son père, il fut amené à fréquenter la bourgeoisie du pourtour parisien qui se livrait volontiers à de longs monologues pour épater la galerie mais qui d'une oreille extérieure s'avéraient parfois d'un grande stupidité. Les notions de bêtise et ses nombreux synonymes ont pourtant des signification aux différences subtiles.
Un de ses amis juif l'avait initié aux interminables débats talmudiques "pilpoul" qui à force de chercher la contradiction avec l'interlocuteur finissent en incroyable non-sens. L'auto-ironie ferait bien d'inspirer certains décideurs ou les packs humoristiques bien lissés dont les médias nous saturent.  Certains deviennent des héros malgré eux d'une aventure cocasse confer les Darwin Awards.

Après ce long préambule, on entre dans le vif du sujet du livre à savoir des extraits de célèbres philosophes ou scientifiques ou écrivains qui se sont rendus coupables de flagrant délit de stupidité lors d'égarements multiples. L'auteur en souligne le coté bête, j'avoue que je me suis parfois un peu perdu, manquant de références à certains moments. Certains auteurs en pensant dénoncer la bêtise se sont laissés gagner par elle, en sorte d'arroseurs arrosés. Finalement nous sommes tous susceptibles d'y succomber à un moment ou à un autre. C'est notre coté faillible que certains scientifiques semblent parfois oublier dans une rigueur inhumaine. Lutter contre la bêtise est un combat vain, beaucoup s'y sont cassé les dents. Peut-être ferait-on mieux de parfois tenter un retour originel à notre intelligence animale et tenter une cohabitation en bons voisins avec les autres espèces vivantes. Petit plaidoyer au passage contre la chasse moderne, la production de viande et la vivisection.  A force d'avoir voulu s'élever au dessus du lot, l'Homme a totalement déséquilibré son environnement, une évolution qui tend à revenir à son point de départ. Un bénéfice ne peut que s'accompagner de son tribut. Les grandes avancées provoquent souvent des reculs pires, prétendument inattendus et pourtant fréquents.

Alors qu'à un moment on se sent peut-être saturé de référence, Denis Grozdanovitch relate encore quelques souvenir personnels notamment un professeur lors de ses humanités qui lui aurait instillé une certaine ouverture d'esprit. Quelques pensées encore sur l'architecture et l'art contemporain qui nous laissent sur une belle réflexion. L'humain et ses nombreux paradoxes, la volonté de l'originalité mène parfois au plus banal copier-coller, la conceptualisation à outrance nous éloigne de plus en plus de sens commun. C'est peut-être là la clé pour échapper un peu à la bêtise: un lâcher prise, une acceptation de sa propre faiblesse et une bonne dose d'autodérision.
Me voilà encore avec une série d'autres ouvrages sur ma pile...



 

Xavier de Maistre - Œuvres




Xavier de Maistre - Œuvres

J'en ai parlé dernièrement de ces voyages autour de ma chambre qui étaient de petites pépites, mais cet auteur savoyard qui fut aussi général russe au XIXème siècle, a aussi publié des sortes de contes, des novellas pourrait-on dire qui de près ou de loin ont quelque rapport avec la vie de soldat.

"Le lépreux de la cité d'Aoste" (1811) est assez court et raconte la vie recluse d'un lépreux à laquelle un jour un soldat s'intéresse. Il est attiré par le beau jardin que le malade entretient avec passion. C'est presque une interview, assez touchant.

"Les prisonniers du Caucase" (1825) parle d'une embuscade entre Cosaques et rebelles des montagnes. Un major a l'imprudence de s'aventurer sur ce chemin réputé dangereux et est fait prisonnier. Son valet tentera le tout pour le tout pour le sortir d'une captivité de plusieurs mois.

Sa dernière pièce littéraire " La jeune sibérienne" (1825) est presqu'un conte de catéchisme. Prascovie est une jeune fille très pieuse qui vit recluse en Sibérie avec ses parents . Elle se met en tête d'aller demander la grâce impériale pour l'exil de son père. Après de nombreux refus, elle finit par prendre la route de Petersbourg pour tenter de réaliser son vœu. L'histoire raconte son long périple et son succès inespéré. Mais tout cela est bien sûr grâce à Dieu ! 


 

Sénèque - La vie heureuse




Sénèque - La vie heureuse

On apprend dans la longue introduction que la question de savoir si Sénèque fut ou non un vrai philosophe a été débattue depuis des siècles. Sa syntaxe se rapprochant plus de la rhétorique que de la logique philosophique et puis aussi sa condition d'homme extrêmement riche l'a peut-être discrédité auprès de certains commentateurs.

Cet essai écrit vraisemblablement en 58 après JC débute sur l'affirmation que la voie de la foule n'est pas bon, qu'il faut suivre sa propre nature plutôt que celle de la majorité. Le souverain bien ne peut être atteint que dans la vertu de l'âme au mépris des plaisirs physiques. La recherche du plaisir peut vite tourner au vice ne doit en rien être un but en soi. S'en suit tout une critique de l'épicurisme en opposition au stoïcisme mais avec un certain respect pour Epicure quand même.

Dans la deuxième partie, Sénèque se défend de ses nombreux détracteurs de l'époque, avoue sa faiblesse, confesse qu'il n'est pas un vrai stoïcien mais tente au jour le jour de s'éloigner de ses vices. Ses leçons sur la richesse qu'il ne veut pas glorifier sont d'assez mauvaise foi, car il prétend qu'il ne faut pas rougir d'une richesse acquise honnêtement, sans en priver d'autres alors que celles dont il bénéficie proviennent de Néron qui est loin d'être un ange.
Bref, je n'ai quand même pas bien saisi les ingrédients miracles pour vivre une vie heureuse.



 

Stefan Liberski - Néron rouge




Stefan Liberski - Néron rouge


Encore une belle surprise et nouveauté provoquée par le hasard du rayon bibliothèque! Ce roman bourré d'ironie mordante paru en avril 2025 m'a bien fait rire. Présenté sous formes de carnets d'un journal intime, il raconte les démons et les secrets qui rongent Néron Favola. Cet homme blanc cisgenre qui est peut-être au fond un peu de droite tente le tout pour le tout pour changer ses vieux réflexes. Son rêve est de publier un grand roman, de connaître une certaine renommée mais surtout d'apparaitre comme un vrai homme de gauche d'une grande coolitude. Il tente de rester jeune à tout prix, il ne faudrait surtout pas donner une image de vieux con rétrograde. Témoin des grandes luttes de l'époque il emboite le pas des questions du genre, des minorités. Dans une sorte de joute perpétuelle avec sa femme, il finit par peu à peu la perdre, tentant en vain de redorer son image. Les réseaux sociaux occupent une place de plus en plus prépondérante dans les relations sociales, une culture de la contestation à tort et à travers, de complaintes perpétuelles monopolisent les conversations, saturent les bandes passantes et Néron est toujours un peu en retard pour choper le train en marche dont la destination change à tout bout de champ. 


 

Serge Gainsbourg - Evguénie Sokolov




Serge Gainsbourg - Evguénie Sokolov

J'ai appris l'existence de ce court conte parabolique dans "Le dictionnaire illustré des pets"  de Christian Deflandre .
Sorti en 1980, il peut être vu comme une critique de l'art contemporain.
Le héro souffre depuis sa naissance d'une faculté extraordinaire à produire des flatulences qui va le poursuivre durant son enfance et son service militaire. Il se passionne pour l'illustration et la peinture et utilise l'émission de ses gaz intestinaux pour se donner l'impulsion d'œuvres hyper abstraites. Le succès est garanti pour cet artiste dont les plus vénérables galeries d'art s'arrachent les toiles. Véritable champ lexical de la proute, on finit quand même quelque peu écœuré quand on referme la dernière page du livre. 


 

Nan Shepherd - La montagne vivante




Nan Shepherd - La montagne vivante

Considérée comme une pionnière du Nature Writing, Nan Sheperd a pourtant d'abord débuté sa carrière littéraire par des romans mais surtout de la poésie. Née en 1893 près d'Aberdeen, elle a toujours été attirée par les montagnes et la nature sauvage écossaise. Cet essai rédigé à la fin de la guerre 40 a trainé pendant une trentaine d'année dans un tiroir avant d'être exhumé vers la fin de sa vie et publié. A sa relecture, elle a pensé que cela n'avait pas pris une ride.

L'introduction est signée par Robert Macfarlane (auteur entre autre de "Par les chemins") et fait un long éloge la comparant à Bruce Chatwin, Patrick Leigh Fermor ou encore John McPhee.
Le récit est découpé en 12 chapitres qui de manière un peu décousue abordent différents aspects de la longue fréquentation des Cairngorms de Nan Shepherd. C'est avec un certain érotisme qu'elle aborde ce milieu particulier et hostile qu'elle avoue ne jamais vraiment avoir appréhendé complètement. Pour elle, gravir les sommets n'est pas une course aux trophées, à la vanité personnelle, mais une véritable rencontre, une quête ontologique.

Après quelques descriptions géologiques et météorologiques, elle décrit l'eau limpide, le gel et la neige, l'air et la lumière. Ensuite elle aborde la faune et la flore de ces montagnes et puis la vie des rares hommes et des femmes qui l'habitent. Des jeunes fougueux en quête de sensation fortes s'y casseront les dents. Le livre se termine par des côtés plus sensuels et le bonheur de dormir à la belle étoile.