Un blog parmi d'autres qui parle de livres. Car des livres j'en avale quand même pas mal. J'essaie de varier les plaisirs en alternant essais, romans, poésie, récits de voyage, philosophie, ethnologie... Ça ricoche, ça rebondit, ça bifurque, ça ouvre la voie de nouvelles perspectives, une lecture en amenant une autre et ainsi de suite, la liste s'agrandit de jour en jour. Plus j'en apprends, plus j'ai l'impression que l'étendue de mon inculture s'élargit.
Marc Augé - Non-lieux
Xavier Mathias - La vie érotique de mon potager
On pourrait croire à une monomanie de Xavier Mathias au rayon jardinage, ce n'est pas faux. Je le trouve tout simplement de bon conseil, sans lourdeurs ni trop technique, mais surtout j'admire son coté terre à terre et loin de certaines théories fumeuses ésotériques.
Bien sûr le titre est racoleur mais il ne s'agit pas là de tapiner de la vente avec du vent. La prose est volontairement quelque peu graveleuse mais toute en finesse. Il manie le verbe aussi bien que la grelinette et martèle sans relâche ses petits trucs pour une bonne rentabilité sans inepties.
Il y est question de sexualité végétale, car c'est bien ça la lutte pour la vie: la reproduction envers et contre tout. L'homme n'a pour se nourrir que tenté de dompter la Nature à dessein mais pour y arriver, il est important de comprendre certaines stratégies. Au fil des pages on a droit aux explications pour optimiser ses cultures avec des légumes ou simples assez communes et savoureuses. Les bienfaits culinaires et parfois quelques notes historiques ou nutritionnelles y sont développés. En point d'orgue quelques variétés chaudes comme la Grosse blonde paresseuse, le piment pénis, le Téton de Vénus ou la Couille de Taureau, le gingembre ou encore la sarriette.
Une lecture enrichissante et utile !
Yuval Noah Harari - Nexus
Yuval Noah Harari - Nexus - Une brève
histoire des réseaux d'information de l'âge de pierre à l'IA
Après l'excellent "Sapiens", puis "Homo Deus" et
"21 leçons sur les XXIème" siècle j'attendais avec impatience le
prochain Harari qui vient de sortir fin 2024. Cette fois il s'attaque à l'Information
au fil des temps et à l'ère qui nous attend avec l'exponentiel développement de
l'Intelligence Artificielle.
Cette brique de près de 500 pages se déroule dans un style clair et accessible
comme l'auteur en a le secret. Exemples à l'appui et développement avec
nombreux rappels et interactions entre les chapitres, il nous est assez simple
de suivre le raisonnement.
On est en droit de se poser la question sur ce qu'est vraiment une
information. Est-ce forcément une vérité? La preuve en est que nombreuses sont
les fictions sur lesquelles une ( grande) partie de notre société est fondée:
Bible, Coran, Torah, Astrologie, Théories du complot.... Pourtant il est
parfois difficile de distinguer le vrai du faux dans le flot ad nauseam qu'est
devenu notre rapport au grand réseau d'internet et des médias. Il faut donc
distinguer la vision naïve de l'information de la populiste. La première tente
d'approcher la vérité en multipliant et recoupant les sources mais n'est pas à
l'abris d'erreurs ou de mensonges, la vision populiste admet que chacun a sa
propre vérité et que l'objectivité n'existe pas.
Dans cette jungle, il n'est pas simple d'y voir clair et de se fier à une
solide base scientifique exempte de parti pris et de lobby.
Distinguons aussi réalités subjectives, objectives mais aussi intersubjectives.
Ces dernières font partie du quotidien de beaucoup de monde: religions, argent,
états. Ces éléments n'existent pas tangiblement mais uniquement parce que des
milliards de gens y croient.
D'abord de tradition orale, on a cru pouvoir fixer une bonne fois le coté
vaporeux d'une histoire avec l'écriture. Des humains faillibles ont voulu
graver pour l'éternité des dogmes qu'on ne remettrait plus en cause. Avec le
temps, tout est devenu obsolète et les croyants pensent encore à une origine
divine de la bible, du coran ou de la torah alors qu'on a cessé de débattre sur
ces textes issus d'on ne sait plus très bien où au fil des siècle. Rien n'a été
plus remanié et réinterprété que ces textes soi-disant infaillibles.
Au Moyen Age, en Occident, l'Eglise
Catholique est parvenue à contrôler toute l'information, réinterpréter une fois
de plus cette pléthore de réinterprétations et empêcher toute dissidence.
L'arrivée de l'imprimerie marque une tournant drastique dans la diffusion de
l'information et ouvre la porte à une multitude d'expressions. Le monopole
n'est plus tenu par l'Eglise et va contribuer aussi à l'essor de la Science.
Mais aussi à l'Inquisition. Une première théorie du complot va naitre sous la
forme d'un réseau mondial de satanistes animés par sorciers et sorcières. Des milers
de malheureux en feront les frais dans d'atroces souffrances. Bien sur au nom
du Bien professé par les religions. La libéralisation de l'information n'a
pourtant pas contribué à la propagation de la Vérité.
Les systèmes aussi bien démocratiques que totalitaires ont dû au fil du temps
s'accommoder des moyens de communications à disposition de leur époque. Les
atrocités commises par le système stalinien n'auraient pas été possibles à
l'époque romaine faute de téléphone, télégraphe etc.
L'auteur a je trouve parfois mélangé un peu marxisme et stalinisme dans sa rhétorique. Ainsi que "anarchie" qui d'après lui est toujours synonyme de bordel chaotique...
Contrairement aux dogmes religieux, les institutions scientifiques sont par définition enclines à se remettre en question. En pratiquant l'autocorrection, elles évoluent sans cesse et sont capables de reconnaître au grand jour leurs erreurs ou inexactitudes passées. La coopération internationale et son caractère empirique aident à s'approcher de la vérité. C'est même comme ça que les grandes avancées ont brillé: en réfutant ou corrigeant les théories précédentes.
L'arrivée de l'informatique et plus précisément de l'IA marque donc un tournant dans l'histoire de l'humanité, le rideau de silicium a fait place au rideau de fer. Ce ne seront plus désormais que des hommes qui rédigeront les livres saints, les lois et les romans mais une instance supérieure en capacité de calcul et de déduction.
En effet, l'IA est capable de prendre des décisions indépendamment de ce que ses programmeurs avaient anticipé. Le mythe de Frankenstein est tout a fait d'actualité.
On attribue aux algorithmes de Facebook par exemple une influence majeure dans la propagation de la haine entre les communautés bouddhistes et musulmanes en Birmanie dans les années 2016-2017, alimentés par des mentors attisant la braise de la violence. Les fondateurs ont misé sur ce qui génère de la présence sur les réseaux, du like et donc comme les publicitaires cherchent bien sûr le nombre, les algorithmes favorisent les fake news, les complots divers qui génèrent bien plus de vues qu'une ode à la paix.
Alors peut-on reprocher à Gutenberg l'impression d'écrits qui ont déclenchés des génocides? Est-ce que Mark Zuckerberg est responsable de la mort de milliers de Rohingyas?
Les géants comme Google sont devenus les vrais maitres du monde car ils peuvent faire plier les gouvernements à leurs désirs en échange de quelques manipulations des algorithmes pour influencer leur élection. On ne peut même pas appeler ça vraiment de la corruption puisque aucun échange monétaire n'est réalisé. C'est bien ce que l'auteur souligne: les vrais riches d'aujourd'hui ne sont plus ceux qui amassent les milliards de dollars mais bien ceux qui amassent les milliards de données sur tout un chacun. Nous leur fournissons même gracieusement le gîte et le couvert en partageant sans cesses nos photos, vidéos, localisations et recherches.
Quid de la fiscalité? Ces entreprises n'exercent aucune activités physiques sur un ensemble de pays et sont donc exempts de taxes. Pourtant l'ordinateur est au centre de toutes les transactions du monde ainsi que de n'importe quelle activité banale.
Par le passé, les plus féroces dictateurs n'ont jamais vraiment réussi à contrôler tous les faits et gestes de leurs sujets, aujourd'hui l'IA peut tout surveiller, compiler, et recouper sans l'aide organique d'un cerveau humain. D'ailleurs les mécanismes qui régissent l'IA échappent à la compréhension humaine et sont capables de créer de nouvelles logiques et pourquoi pas de nouveaux dieux ? Tout cela est sur le point de devenir incontrôlable quand on laisse de plus en plus l'informatique remplacer les humains.
Alors qu'avant certains systèmes de communication, une démocratie ou une véritable dictature à grande échelle n'était pas faisable, la multiplication de bots va complètement biaiser le débat démocratique en choisissant certains sons de cloche et en passant sous silence certains points de vue. Pour la dictature qui aime tout centraliser et a des tendances à la paranoïa, l'IA pourrait devenir son pire ennemi.
Les métiers faits par les humains ont du plomb dans l'aile, la machine a des capacités d'adaptation bien plus rapides que nous et n'est pas influencée par un quelconque sentimentalisme bien qu'elle finira bien par éprouver souffrance et compassion. Nous devrons nous adapter, changer plusieurs fois de fonction durant notre vie. Paradoxalement, l'IA a plus d'aptitudes à exercer des métiers comme médecin que comme infirmer, comme conseiller financier que plongeur dans un restaurant.
Bref, comme l'humain a toujours préféré l'Ordre à la Vérité, qu'il a une fâcheuse tendance à s'autodétruire, il y a de fortes chances qu'une IA toute puissante prolonge la tendance et finisse par nous éradiquer. Dans une vision plus optimiste, elle développera toute une série d'aptitudes à l'autocorrection et d'entraide mais il se peut bien que cette machine non organique nous échappe dans une logique qui n'aura plus aucun rapport avec nos capacités de compréhension.
San-Antonio - Entre la vie et la morgue
De la bonne humeur comme d'habitude avec un bon San Antonio contre les jours de grisaille. Celui ci est le 36ème épisode sorti en 1959. Les deux comparse Pinaud et Bérurier y sont forts présents et c'est face à un San-Antonio un peu mou du bulbe sur cette enquête que ces derniers vont jouer une place prépondérante. Il est question de Greta-de-Hambourg qui œuvre pour une bande de terroristes qui s'en prend à tout ce qui est américain sur le sol français et va faire sortir le Dabe de ses gonds face à cette enquête qui patine. Heureusement, non sans quelques blessures des duettistes collègues du commissaire, celui ci triomphera bien sur de cette bande de malfaiteurs.
Xavier Mathias & François Couplan - Faîtes pousser et dégustez vos protéines
Sorti en 2019 ce livre nous apporte quelques notions de nutrition et nous montre qu'on peut tout à fait se passer d'animaux pour subvenir à son propre équilibre alimentaire.
Dans nos régions occidentales, nous sommes submergés de protéines avec le régime carné qu'on nous impose dès notre tendre enfance. La guerre tout ça... a laissé des séquelles sur ce qu'il est bon de manger pour être en forme, pourtant une grande partie de l'humanité n'a pas accès à ces tonnes de barbaque produites industriellement, pire les pays pauvres s'affament pour produire des céréales qui viendront nourrir notre bétail.
Ici nous ne sommes pas en reste: monoculture de maïs qui pourrait servir à nous nourrir directement.
Xavier Mathias nous interpelle dès le début sur ce qu'est vraiment un jardin nourricier. En effet, le potager est devenu un jardin spectacle pour paraphrase Guy Debord et "La société du spectacle". C'est-à-dire qu'on n' y fait bien souvent pousser que le quarté gagnant tomates, courgettes, laitues et haricots verts. Ne boudons toutefois pas le plaisir d'en consommer mais il bon de s'interroger sur ce qui nous rempli vraiment.
Il est aussi absurde parfois de désherber des plantes qui sont sources de vitamines et protéines pour y cultiver des graines semées. Il est utile de combiner les céréales avec les légumineuses pour avoir tous les acides aminés nécessaires alors que bien souvent les feuilles sources de protéines se suffisent à elles-mêmes.
Le livre est organisé avec des fiches par plantes qui contiennent reconnaissance, conseils de culture, dates de semis et récoltes, rapport protéiné pour 100gr, anecdotes et parfois même des petites recettes faciles et rapides pour les accommoder. Ainsi nous apprendrons presque tout sur les sauvageonnes qu'il suffit de débusquer pour s'en régaler, les graines farineuses (fabacées..), les fruits, graines oléagineuses, parties souterraines et les feuilles. Par type, les plantes sont classés du plus protéiné (soja par exemple) à d'autres dont le taux est plus anecdotique.
Après ça il n'y plus qu'à comme on dit!
Bret Easton Ellis - Glamorama
Qu'attendre d'autre qu'une ambiance qui baigne sous le feux des projecteurs, du showbiz avec un titre pareil? Pour son quatrième roman sorti en 1998, Bret Easton Ellis affirme une fois plus son style très visuel voire cinématographique et montre qu'il maitrise l'art du dialogue inutile. Arriver à remplir des pages avec autant de superficialité affichée revêt presque du génie. Le culte de l'apparence apparaît aussi avec éclat lors de ces descriptions au style quasi policier où de nombreuses marques sont citées comme une preuve de luxe ostentatoire.
Il est question d'une inauguration d'une nouvelle boîte dont le boss prépare la grande ouverture. Tout doit être parfaitement dans le coup avec classe, la liste des invités du monde des stars nous et dévoilée jusqu'à la nausée. Victor Ward fait partir de ce monde et veut en mettre plein la vue, son agenda est serré entre séances d'épilation, photos, mannequinat, aventures sexuelles, dialogues vides sans oublier des cachets d'anxiolytiques avalés pour surtout ne pas remettre quoi que ce soit en question. Tout tire en longueur pour finalement se rendre compte qu'on baigne en plein film ou plutôt une suite de séquences qui oscillent entre gore, porno, fêtes et histoire terroristes et d'espionnage. Comme si l'auteur avait voulu écrire 4 livres à la fois et finalement la sauce ne prend pas. Je me suis forcé à arriver au bout de ces 534 pages pour ne pas comprendre vraiment l'intérêt d'une telle histoire décousue? Franchement déçu. Je vais devoir m'en remettre avant de retenter un autre de Bret Easton Ellis.
Rémy Oudghiri - Déconnectez-vous!
Rémy Oudghiri - Déconnectez-vous!
J'avoue que je m'attendais à une fronde contre internet, mais cet ouvrage va plus loin que ça et aborde vraiment plusieurs niveaux et aspects de la déconnexion.
Le début nous montre un peu les mécanismes qui ont conduit cet élan qui a changé notre quotidien et notre rapport au monde. Après l'arrivée de l'internet chez quasi tout le monde, on est entré dans une nouvelle ère lorsque internet est devenu omniprésent via les téléphones portables.
Aubaine pour les grands timides, cet outil nous permet partout et tout le temps d'être au courant de la moindre nouvelle (bien souvent dispensable) mais aussi d'être vecteur de replis sur soi. Nous devenons moins présent au monde dans notre bulle virtuelle. Enquêtes et sondages à l'appui, on constate une complaisance de plus en plus puissante qui nous fait préférer surfer dans ce flot continu de pseudo-vie au lieu d'affronter notre environnement. Alors qu'une certaine gratuité prospère sur le web, on devient un consommateur encore plus malléable aux yeux des marchants en tout genre.
Bien que ce ne soit pas forcément l'apanage d'internet, notre conscience du présent se fracture pour flotter dans un flux tendu de surinformation, de vie par procuration. Une véritable addiction peut se créer et, ironie du sort, il existe des applications payantes pour pouvoir brider notre besoin de connexion.
Internet était censé nous faire gagner du temps pour plein de choses, mais on se rend compte que ce réseautage nous en fait perdre en nous aliénant. Notre cerveau perd de sa capacité cognitive, plus besoin de calculer, de réfléchir, de fouiller, il suffit d'ouvrir la bouche et gober tout cru.
Face à cette vague de plus en plus incontrôlable, ce dictat de la modernité, des mouvements se créent pour palier à ce raz-de-marée.
Dans la deuxième et troisièmes partie, il est question aussi de déconnexion du train-train quotidien, d'une vie qui ne nous convient plus. Bien souvent ce sont des échappées du monde sociétal. Marches, vacances, méditations, isolement volontaire, reconnexion avec la nature, mouvement "slow" sont abordés via quelques exemples. Plus spécifiquement, Rémy Oudghiri va vraiment développer quatre auteur classiques dans leur démarche de déconnexions avec leur temps.
Sénèque recommande l'oisiveté pour devenir une sorte de penseur patenté qui par ses écrits influencera les hommes d'actions vers la sagesse. Ou alors les actifs peuvent prendre un recul temporaire pour se poser, réfléchir à leurs erreurs ou leurs égarements loin du tumulte pour mieux revenir dans la vie active ragaillardis.
Rousseau à la fin de sa vie a exprimé son amour pour la rêverie, la solitude. Chaque divagation de l'esprit est propre à chacun et permet de tâter les sensations que nous procure le monde.
Thoreau en s'isolant à Walden a voulu se concentrer sur l'essentiel. Comme démarrer une vie originelle sans préjugés, pour dégager les œillères que nous impose la vie en société et se poser solidement sur le socle de la Vie, au plus proche de la nature.
Herman Hesse en plein boom de l'industrialisation alerte sur les bienfaits de lever le pied, de prendre le temps, de faire un pas de côté sans à tout prix optimiser chaque minute dans un but productif.
Ces quatre auteurs prônent tous une déconnexion pour mieux se reconnecter à soi-même et atteindre une forme de vie plus authentique.
Que faire donc aujourd'hui pour prendre de la distance face au tohu-bohu qu'est devenu le monde?
Plusieurs pistes s'offrent à nous , comme pratiquer l'ironie, considérer notre univers comme une farce, ne pas se prendre au sérieux. Mais à force de tout prendre à la légère, on pourrait vite aussi perdre le control de nos vies et revêtir un habit de trop grande nonchalance. A nous de trouver le juste milieu, mais en tous cas jeter l'encre, prendre parfois du recul dans le courant perpétuel.
Sarah Marquis - L'aventurière des sables
Sarah Marquis - L'aventurière des
sables
Ce récit de 14 000 km à pied à
travers les déserts australiens fut publié en 2004 dans une relative
indifférence, aussi il a été retravaillé et est ressorti en 2018 alors que
l'auteure bénéficiait de plus de notoriété, mais aussi après avoir écrit
d'autres livres de marche aventureuse.
Ce qui change un peu des classiques récits de voyage, c'est qu'ici la
protagoniste est une femme et qu'en plus ses périples datent du XXIème siècle.
Dotée d'une véritable volonté d'acier mais aussi d'un amour inconditionnel pour
la nature, Sarah Maquis va murement préparer son long trek pendant des mois
pour préparer son corps à l'effort, la soif, la faim, mais aussi à porter un
sac de 30kg sur le dos. Grâce à son frère qui lui apportera une précieuse aide
logistique elle va donc se lancer dans cette marche au long court dans un
endroit hostile.
Pour ne pas lasser le lecteur, elle ne déballe pas un récit au jour le jour
surtout que son voyage a duré 17 mois...
Pour commencer, une courte autobiographie, mais aussi un rappel rapide et de
l'histoire atroce que les aborigènes ont
subi dès que l'homme blanc anglais s'est approprié cette terre qu'il
considérait comme vierge et disponible. Empoisonnements, pillage systématique
des nouveaux nés, les aborigènes ont longtemps été considérés comme des bêtes
et comme souvent en cas de colonisation, confiscation de leurs espaces de vie. On
peut parler de véritable génocide.
Le périple commence à Alice Springs et elle va faire une grande boucle horaire
au milieu de la plus grande île du monde. Elle décrit un peu la nature qui
l'entoure, mais aussi surtout son quotidien parfois intime. Elle expose ses
difficultés, les railleries des hommes dans les pubs perdus au milieu de nulle
part mais aussi ses joies. On se rend compte des difficultés supplémentaires
qui s'ajoutent à ce genre d'exploit précisément quand on est une femme.
Végétarienne, elle décide de chasser exceptionnellement pour survivre et
renouer avec des pratiques ancestrales de subsistance non sans une certaine
réticence. Sous parfois 50°C à l'ombre, c'est une lutte permanente contre la
déshydratation, elle doit souvent aller chiper de l'eau près des grands
troupeaux. Il faut aussi adapter sa progression et marcher de nuit pour éviter
la fournaise.
De rencontres il est aussi question, alors que parfois celles-ci s'avèrent
démontrer une fois de plus la bassesse de la race humaine, d'autres lui
apportent une profonde réflexion salvatrice. Elle fera aussi la rencontre et le
sauvetage d'un chien croisé avec un dingo qui ne la quittera plus. Ces
renouements avec la civilisation, elle ne les savourera qu'à doses
homéopathiques, sa soif de solitude et de vrai contact avec la nature seront
toujours plus forts.
Joël Vernet - Le désert où la route prend fin
Joël Vernet - Le désert où la route
prend fin
L'écriture est une sorte d'ersatz de vie, à quoi bon s'y adonner? Silence et solitude s'y prêtent pourtant bien. La jeunesse qui ne revient plus, la mort, le travail forcé, les hommages, l'abandon mais cette affirmation souvent martelée que nous n'avons pas de dieux ni de maîtres pour nous faire courber l'échine. Les saisons qui passent, la dualité du monde, cette errance qui à pour nom la vie et nous font tourner un peu en bourrique. Vie nomade qui s'oppose au concept de maison, ode à la vie sauvage comme nous pouvons l'être un peu en voyageant ou à travers les livres qui sont bien plus que du simple papier.
On finit sur une sorte d'hommage à Nicolas Bouvier.








